ALLOCUTION DE CHRISTIAN GIGUÈRE Secrétaire général de la chaire Madame la Vice-Rectrice, Cest un grand privilège de madresser à vous ce soir en tant quétudiant doctoral du professeur Ayoub et en tant que secrétaire général de cette chaire UNESCO en philosophie. Mais il me fait tout autant plaisir de madresser à vous en tant que jeune, jeune chercheur de lUQAM, jeune intellectuel désireux de prendre place dans lespace public, dans les débats qui ont cours quant aux choix qui orienteront et influenceront les conditions dans lesquelles sera susceptible dévoluer la prochaine génération de citoyens. Je napprendrai certainement pas à qui que ce soit ici les difficultés de la recherche fondamentale en matière des droits de lhomme et du citoyen. Je ne vous apprendrai pas non plus, à vous honorables dignitaires de la magistrature et aux autres acteurs du milieu intellectuel : philosophes, juristes et chercheurs des sciences humaines, combien, du point de vue dun jeune, est nécessaire lavancement de la recherche dans le domaine de léthique et de la justice sociale. Les personnes qui ont parlé avant moi ont bien souligné ce point et ils continueront, jen suis sûr, à mettre en uvre tout leur savoir en ce sens. Pour les jeunes citoyens, intellectuels ou non, et provenant de toutes les couches de la structure sociale, une question revient ; comment efficacement appliquer les grands idéaux dune société démocratique libérale ; comment parvenir effectivement à une plus grande justice sociale? Cette question est pratique. Je dirais quelle est philosophiquement pratique. À lheure où le pluralisme impose aux sociétés démocratiques modernes la nécessité de justifier adéquatement les principes de liberté et dégalité, linternationalisation des échanges économiques coïncide avec ce que lon pourrait appeler une perte de popularité des droits démocratiques. Quest devenue, dans ce contexte de libre concurrence, la liberté du citoyen, quest devenue la liberté du jeune citoyen ? Comme lannoncent les travaux de la Chaire, je pense que le grand défi qui soffre aux jeunes intellectuels ne rencontre pas seulement le grand défi du pluralisme que nous impose la vie dans les sociétés démocratiques modernes. Le défi est dautant plus grand quil consiste à trouver les moyens les plus efficaces qui soient pour appliquer dans nos sociétés les grands idéaux démocratiques que nous partageons et que les générations précédentes se sont efforcées de justifier moralement, rationnellement. Le défi consiste également à faire la promotion de ces valeurs dans un contexte social où nos institutions telle la liberté semble appartenir de plus en plus à ceux qui dominent le marché, comme vient de le souligner Madame Ayoub. En soi, le problème de la justification des principes de liberté et dégalité dans un contexte pluraliste demeure un problème théorique. Mais dès lors quon considère rationnellement la promotion de ces valeurs démocratiques comme soulevant une condition de publicité nécessaire à leur pleine justification morale, le problème devient alors aussi un problème pratique. La Chaire UNESCO détude des fondements philosophiques de la justice et de la société démocratique doit être un lieu de réflexion où de jeunes chercheurs, à côté de leurs aînés travailleront à repenser la représentation du citoyen moderne et sa nécessaire participation dans le débat public. En ce tournant de siècle, de millénaire, lengagement de lintellectuel dans la sphère publique nest plus un luxe, cest une nécessité pratique pour assumer nos responsabilités en matière de promotion et du respect de nos grands idéaux. La délibération du citoyen comme condition à une société juste et équitable devient effectivement possible par la promotion des idéaux démocratiques au moyen, entre autres, de léducation, la formation et linformation. Cette Chaire doit devenir un point de référence public, capable de développer des outils pratiques et des points de vue qui serviront le jeune intellectuel à prendre place dans les débats de fonds qui non seulement servent à faire des choix pour nous, mais qui influencent la ou les générations suivantes. Suivant les constats quétablit la Déclaration sur les responsabilités des générations présentes envers les générations futures adoptée par lUNESCO en novembre 97, la Chaire en philosophie pourrait devenir un lieu de promotion des idéaux dune équité entre les générations. Le plein respect des droits de lhomme constitue, entre autre, une condition nécessaire à la protection des besoins et des intérêts des générations futures. Également, afin de lutter contre la pauvreté, la génération actuelle de citoyens, et dintellectuels, doit sassurer dun développement socio-économique équitable, durable et universel. Une utilisation juste et prudente des ressources actuelles est un moyen de garantir aux générations futures une sorte déquité entre les générations. Dans notre contexte, pensons aussi au dossier des clauses dites orphelin, à la déréglementation en matière environnementale, aux différents dossiers jeunesse et à nos programmes sociaux, notamment en matière de pauvreté. Enfin, léducation, léducation à la citoyenneté, est, je pense, un moyen de base essentiel par lequel nous pouvons repenser la représentation et la délibération du citoyen moderne. Donner, en effet, aux jeunes citoyens les outils pour penser et pour pouvoir ainsi leur permettre de distinguer une conception particulière du bien dune valeur commune, leur donner les moyens de représenter ces valeurs selon un discours logique, sont des investissements démocratiques; cest accepter une plus grande participation démocratique, cest un gage de stabilité politique. La Chaire UNESCO en philosophie, en compagnie de lassociation de philosophie du droit Dikè, où juvre activement, devrait servir de lieu privilégié où les intellectuels et les jeunes intellectuels devront débattre de ces idées et les justifier moralement. Cest également un socle à partir duquel la justification théorique des principes de justice trouvera son sens dans la pratique. Je vous remercie |